L’hiver a du mal à s’installer, encore des journées à plus de 10° dans la première quinzaine de décembre… Il est grand temps maintenant que le froid arrive pour permettre aux colonies d’hiverner. À cette saison, que se passe-t-il donc à l’intérieur de la ruche ? Tout apiculteur, novice ou expérimenté, doit bien connaître le « fonctionnement » de ses colonies. Nous allons, par ces quelques lignes, essayer de le comprendre et parer à tout manquement.
Elles sont vraiment surprenantes, ces abeilles : malgré le froid pendant les mois d’hiver, elles savent maîtriser la température. Pendant que celles, présentes à l’extérieur de la grappe, constituent une « couche isolante », alors que les autres, au centre, en consommant le miel qui est désoperculé au fur et à mesure de leurs besoins, et en faisant vibrer leurs poils, souvent pectinés, c’est-à-dire divisés comme des peignes, les abeilles sont capables d’élever leur température grâce à des contractions rythmiques des muscles de leurs ailes et de la garder grâce à leur pilosité. La température, au sein de la grappe, oscille aux alentours de 35°. Attention, il ne faut en aucun cas les déranger, elles assurent leur survie en étant groupées et toute perturbation de la grappe peut mettre la colonie en péril. De la même manière, vous ne devez pas faire de transfert de ruches pendant cette période. Lorsque le soleil sera bien présent et les températures un peu plus élevées, elles sortiront rapidement pour vider leur ampoule rectale ; pour ceux qui ont leurs ruches dans leur jardin, attention au linge qui est étendu : il pourrait se trouver maculé de tâches brunâtres…
Il va être temps maintenant de faire un traitement complémentaire contre varroa (acteur principal dans la mortalité des colonies), par sublimation ou par dégouttement avec de l’acide oxalique (VarroMed par dégouttement ou Apibioxal et Oxybee), ces trois médicaments possèdent une AMM (Autorisation de mise sur le marché mais ATTENTION : protégez-vous en mettant un masque contre les vapeurs d’acides organiques, ainsi que des lunettes de protection adaptées. Mettez également des gants et une combinaison car l’acide pénètre dans l’organisme par les pores de la peau. En même temps que ce traitement d’hiver, pensez à poser une plaque graissée avec de la graisse à traire sur le fond de la ruche, pour l’observation des chutes de varroas après quelques jours suivant le traitement et ainsi avoir une idée de l’infestation et de l’efficacité du traitement d’été. Il n’est pas rare de constater la chute de plusieurs centaines, voire de quelques milliers de ces parasites qui font des ravages dans nos colonies. Moins le nombre de varroas sera important et mieux se portera la colonie à son réveil.
Si vous avez bien surveillé cet automne l’état des provisions, vous n’avez pas à vous inquiéter, mais si l’élevage a débuté avec l’apparition des premiers chatons sur les noisetiers, la consommation va nettement augmenter ; n’hésitez pas à soupeser délicatement, sans à-coups et régulièrement vos ruches et si vous jugez qu’elles n’ont pas suffisamment de provisions, vous pouvez déposer un demi pain de candi posé sur le trou de nourrissement, en ayant pris soin de ne faire qu’un trou d’environ un centimètre pour éviter que le candi ne coule et englue la grappe avec la chaleur que dégage celle-ci. Pour ceux qui utilisent des nourrisseurs couvre-cadres, soulevez-le, posez délicatement le pain de candi ramolli au préalable sur la grappe d’abeilles, en ayant pris soin d’enfumer pour éviter les écrasements, mettre un journal ou un morceau d’une couverture de survie (qui possède un avantage par rapport à la feuille d’aluminium, celui d’être résistante et ne pas se déchirer) cela permettra de bien calorifuger et retournez le nourrisseur couvre-cadres (cette opération n’est possible que s’il fait suffisamment doux).
Les réserves stockées ont normalement été suffisantes, sauf sur les ruchers où le frelon asiatique était présent, il a fallu être réactif, nourrir suffisamment afin d’aborder cette phase hivernale dans de bonnes conditions, mais attention, un début d’hiver assez clément (favorisant la consommation de réserves) implique une surveillance particulière et une vigilance accrue. Il ne faudra pas hésiter à distribuer du candi. Même si cet apport n’est pas le fruit de la récolte des abeilles, apporter du candi vaut mieux que de laisser une colonie « mourir de faim », c’est à la fois très contrariant et impardonnable…
Faites le point sur le matériel à renouveler et à acheter, ne vous y prenez pas au dernier moment car vous pourriez avoir la mauvaise surprise de constater que votre distributeur soit en rupture de stock… Si vous imprégnez vos bois de ruches ou ruchettes avec une lasure ou un produit protecteur tel que l’huile de lin, pensez au temps de séchage. Pour ceux qui ont fait l’acquisition de ruches en pin douglas (plus chères mais plus résistantes), le traitement n’est pas obligatoire, le bois va griser et le constat sera de voir ces ruches sans protection, résister dans le temps.
Il est temps également de fondre les cadres pour récupérer la cire. Surtout, ne mélangez pas tout et faites un tri au préalable afin de différencier celle des corps et celle des opercules. La cire la moins belle servira à fabriquer des bougies ou sera vendue à un artiste sculpteur pour ses moules ou à un ébéniste pour la confection d’encaustique. L’autre, plus pure, pourra à l’aide du gaufrier mis à disposition par votre syndicat, vous permettre de fabriquer vos propres cires gaufrées qui seront d’ailleurs bien mieux acceptées que celles du commerce.
Mettez à profit ces mois d’automne et d’hiver pour vous cultiver et vous enrichir avec des ouvrages apicoles ; vous pourrez y puiser de judicieux conseils car il faut reconnaître que le sujet est complexe ! En cette période festive, un beau livre sur l’apiculture, ancien ou récent, est une excellente idée de cadeau !
Plus que jamais, il nous faut être informés. Rendez-vous maintenant en février.
Bonne année 2024 à toutes les apicultrices, tous les apiculteurs et toutes les abeilles de la Manche !
A.L. et K.L.